L’enquête que nous avons poursuivie jusqu’à maintenant avait pour but de mieux comprendre les fondations humaines, socio institutionnelles et anthropologiques sur lesquelles et autour desquelles les diverses formations sociales ayant réellement existées se sont cristallisées. La lumière jetée sur ces fondations doit nous permettre de faire la synthèse des grandes lignes de force autour desquels se sont déployés ces modèles de développement pour en arriver à proposer un nouveau modèle plus complet et plus réaliste – un nouvel ensemble théorique que l’on va appeler : « homo practicus/développement réaliste ».
On nous rétorquera avec raison que dans les faits, le modèle de développement « homo practicus/développement réaliste » que nous proposons représente ce qui existe largement dans la pratique quotidienne de nos sociétés occidentales Le développement économique n’est pas dans les faits inspiré par un modèle unidimensionnel, quel qu’il soit, puisque l’encadrement juridique et légal, le balisage institutionnel, administratif et normatif, les traditions humanistes et culturelles, le jeu des forces sociales organisées en présence (patronat, état, syndicats, associations professionnelles, etc.) sont autant de facteurs qui viennent pondérer le développement et l’activité économique au sens strict et l’infléchir au moins en partie dans un sens orienté – orienté vers la paix sociale, le respect des droits et de la dignité humaine, l’intérêt général, l’harmonie, l’ordre et le bien commun. Mais alors, pourquoi ne pas adapter nos modèles théoriques de développement économique à ce qui représenterait les compromis et les synthèses nécessaires et obligées dans la genèse de sociétés prospères, humaines et viables.
Les enseignements qui sont ressortis de notre enquête pourront nous guider dans l’élaboration d’un modèle, plus complexe certes que les modèles simplifiés existants, mais qui aura l’avantage de pouvoir inspirer et de pouvoir soutenir une démarche globale de développement économique – développement économique enchâssé dans une logique plus globale de développement harmonieux des sociétés humaines. Pour atteindre ses objectifs, notre nouveau modèle de développement économique devra donc s’articuler autour des trois grands axes suivants :
L’axe 1) Sociétés sacrées ou religieuses/monde séculier et laïc (principes de développement)
L’axe 2) Anthropologie du libéralisme (principes de développement) versus anthropologie du socialisme (principes de développement)
L’axe 3) La nouvelle économie politique (principe de développement)
Tout projet de développement économique doit aborder le collectif dans lequel devra s’inscrire le projet en se donnant, en fonction de toutes les spécificités locales existantes, les moyens de saisir la place exacte qu’occupe le collectif en question dans l’échelle qui va du mode religieux transcendant au mode séculier immanent.
Tout projet de développement économique doit aborder le collectif dans lequel devra s’inscrire le projet en se donnant, en fonction des spécificités locales existantes, les moyens de saisir puis de résoudre les contradictions dialectiques engendrées par l’antagonisme libéralisme /socialisme (anthropologie du libéralisme et anthropologie du socialisme).
Tout projet de développement économique doit aborder le collectif dans lequel devra s’inscrire le projet en se donnant, en fonction des spécificités locales existantes, les moyens de saisir le type d’architectonique institutionnelle (avec ses leviers, mécanismes et dispositifs spécialisés) la plus susceptible de favoriser un développement économique vigoureux et harmonieux.
1) Fondation anthropologique du Réalisme économique
La force du modèle de développement économique que nous proposons réside dans le fait qu’il s’agit d’une conception théorique qui au lieu de prendre parti sur un aspect du réel au détriment des autres – puis d’opérer une simplification réductrice assurant la formalisation au détriment de la complexité – accepte la complexité du réel et cherche à l’intégrer dans la schématique centrale du modèle théorique proposé. Et cette complexité du Réel dont nous faisons référence peut assez bien s’appréhender, croyons-nous, si l’on tient compte des trois grands groupes de phénomènes que nous intégrons ici dans les trois grands axes problématiques qui composent notre modèle.
a) Mode religieux/mode séculier
Il semblerait qu’il existe tendanciellement deux grandes formes de civilisation possibles – avec tous les dégradés que l’on veut. Ces deux grandes formes pures ou matrices dessinent une sorte de spectre « mode sacré (religieux)/mode séculier » le long duquel toutes les sociétés réelles pouvant exister vont nécessairement se situer.
L’analyse des sociétés ancrées dans le religieux ou encore dans des formes sacrées d’organisation ne répond pas des mêmes principes de développement en général et de développement économique en particulier que les sociétés immergées dans le mode séculier et laïc d’organisation et de développement. Ceci est très important car les principes de développement et les modèles théoriques qu’a tendance à appliquer la théorie économique (et qui inspirent les projets de développement économique) lorsqu’elle se penche sur ce genre de société ne peut qu’engendrer des incongruités gigantesques : c’est ce qui se passe actuellement en Irak mais la liste des exemples serait trop longue pour tenir dans un tel travail – c’est également le cas pour un pays comme Haïti.
Lorsqu’une société vit de manière prédominante sous le mode du religieux ou du sacré, elle se voit gouvernée par des principes qui ne sont pas les mêmes que ceux présupposés dans les grands modèles théoriques en vigueur : ces genres de sociétés s’avèrent davantage gouvernées par des entités transcendantes (cosmologies, totems, figures hiératiques, etc.) que par des entités immanentes (état, leader politique, mouvements politiques ou sociaux, etc.). elles s’en remettent davantage à des puissances immatérielles (esprits, dieux, etc.) qu’à des puissances matérielles (machines, appareillages, etc.) ; elles croient davantage à des forces surnaturelles (énergies supra humaines, magie, sorcellerie, etc.) qu’à des forces naturelles (forces physiques, électromagnétiques, humaines, animales, etc.) ; elles investissent davantage leurs énergies « supra humaines » dans l’accession à un monde invisible que dans la construction d’un monde matériel visible ; l’accomplissement par le spirituel prévaut sur toute forme d’accomplissement dans les œuvres terrestres, patrimoniales et immanentes.
Principes de développement :
L’objectif, dans un premier temps, sera de développer un modèle qui tienne compte de l’état historique d’une société sur l’échelle « anthropologique » qui va du « mode religieux ou sacré » au « mode séculier ou laïc ».
Ces enseignements doivent s’inscrire dans notre nouveau modèle de développement économique : comprendre où habite une société, saisir où se situe cette société sur l’échelle mode religieux/mode séculier, c’est se donner les moyens d’intervenir efficacement par rapport à cette dernière (et dans le respect de ses fondations) plutôt que de proposer des projets de développement qui ne feront que détruire les principes et les fondations autres sur lesquels reposent ces sociétés – tout en ne parvenant jamais d’ailleurs à atteindre les objectifs économiques souhaités. Combien de projets de développement, dans les pays du tiers-monde notamment, mis de l’avant par les organismes internationaux de développement, ont échoué faute de n’avoir pas su comprendre les principes hiératiques et les bases anthropologiques sur lesquelles reposaient ces sociétés.
Économiquement parlant, une société inscrite dans des formes rituelles sacrées tend à résister à l’implantation des processus et des mécanismes économiques séculiers à partir desquels se sont élaborées nos sociétés industrielles :
La propension à accumuler, aussi bien individuellement que collectivement, ne prévaut nullement (si même elle existe)
La propension à produire, à produire toujours plus et à produire de manière toujours plus efficiente ne tend pas à prévaloir (aussi bien collectivement qu’individuellement)
La propension à se réaliser dans la construction d’un monde matériel minutieusement « construit et incarné » n’est pas un impératif dominant – puisque le salut est dans l’au-delà et ne réside pas les œuvres intramondaines
La propension à croire en un affranchissement fondé sur la science et la technologie ne représente pas un phénomène majeur comme dans nos sociétés industrielles avancées
La propension au changement, à l’initiative (privée), à l’innovation, à la transformation du monde, à la domination de la nature et à la créativité/création ne représente nullement des dispositions dominantes (aussi bien chez les individus qu’au niveau collectif – c’est même plutôt le contraire qui est vrai).
La propension à épargner puis à consommer « rationnellement » des richesses produites puis appropriées ne prévaut pas ; la tendance est plutôt de consumer toutes les richesses disponibles afin de relancer le cycle de l’échange symbolique.
- b) Anthropologie du libéralisme/anthropologie du socialisme
L’enquête anthropologique que nous avons menée au sujet des modèles de « l’homo oeconomicus » et de « l’homme nouveau » nous sera utile dans la mesure où elle fait apparaître toute l’importance, pour une théorie économique qui se veut rendre compte de la complexité du réel, de proposer un modèle qui opère la synthèse de ces deux modèles généralement considérés comme antagonistes : homo oeconomicus/homme nouveau.
Une théorie économique qui se veut plus achevée doit certes partir de l’idée de la personne humaine considérée comme une entité individuelle inaliénable, dotée de qualités naturelles tendancielles propres : appropriation spontanée des choses, transformation nécessaire du monde environnant, liberté naturelle, appétits animaux, instincts primaires, curiosité naturelle, etc. Mais elle ne peut pour autant renier le jeu nécessaire de cette autre dimension incontournable de la nature humaine : la personne humaine comme être de croyances, être de valeurs, être de spiritualité, être de sociabilité, etc.
D’ailleurs, ce que nous avons appelé les grands « compromis historiques » réalisés en occident : systématique de société de type libéral, systématique de société de type social démocrate, systématique de société de type néo libéral, systématique de société de type social étatisme … relèvent tous d’une manière ou d’une autre d’une sorte de synthèse dynamique entre les deux tendances anthropologiques de la nature humaine que nous avons identifiées. Ces vastes compromis réalisés en occident ont cherché d’une manière ou d’une autre à opérer la synthèse dynamique entre les tendances individualistes et égoïstes existantes chez l’être humain et les tendances socialisantes et altruistes également présentes chez l’être humain – tout en éliminant les impondérables qu’aucun modèle de développement ne peut tolérer : les crimes, la corruption, le vol, le chantage, l’extorsion, etc.
Le libéralisme démocratique met évidemment l’accent sur la liberté première de l’individu mais il met également l’emphase sur le rôle « régulateur » (les grands équilibres d’ensemble, la justice, l’équité, l’égalité de principe, etc.) que doivent remplir les mécanismes et institutions démocratiques ainsi que sur la dimension sociale, famille, associative, sympathique (sympathie chez Adam Smith) et compassionnelle de la liberté humaine. C’est sa façon de résoudre l’équation dont nous avons posé le principe.
La sociale démocratie attache évidemment une importance fondamentale à la liberté humaine et à sa réalisation plénière (liberté inaliénable il va s’en dire), mais elle considère au fond qu’une partie de cette liberté se réalise nécessairement par l’intermédiaire de la qualité des relations sociales entretenues par les personnes (sens, authenticité, échange humain, amour et amitié) ainsi que par l’intermédiaire d’un aménagement politique des contraintes collectives favorisant le vivre ensemble (redistribution de la richesse via des mécanismes collectifs démocratiquement institués, formes diverses de solidarité, transfert de ressources, etc.). C’est sa façon de résoudre l’équation dont nous avons posé le principe.
Le néo libéralisme, dans sa forme théorique première, constituerait le système économique le plus conséquent et le plus approprié pour réaliser pleinement la figure de l’homo oeconomicus. Si sa faiblesse réside dans le fait que cette figure de l’homo oeconomicus n’existe pas dans les faits – c’est ce que notre enquête anthropologique a voulu démontrer – ce modèle global d’organisation et d’édification des sociétés s’avère tout à fait adapté à ses postulats théoriques de base. Si la nature humaine répond effectivement de ce qu’on surnomme l’homo oeconomicus, l’essentiel des mécanismes et des dispositifs institutionnels effectivement érigés dans les sociétés démocratiques dénaturent et aliènent dans une certaine mesure la libre nature humaine. C’est sa façon de résoudre l’équation dont nous avons posé le principe.
Le social étatisme ne remet absolument pas en question l’idée de liberté chez l’être humain, sous quelque aspect qu’on veuille bien la considérer. Son originalité réside dans le fait que la synthèse dynamique qu’il cherche à opérer passe par l’édification et l’utilisation délibérée d’un levier politique installé au cœur de la société et devant participer activement au développement économique de cette même société : les économistes n’aiment pas cette appellation mais dans les faits l’État s’est retrouvé plus d’une fois à jouer ce rôle et ce, même dans les sociétés industrielles dites démocratiques (très souvent dans les sociétés dites du tiers monde). Cette emphase mise sur les artefacts institutionnels nous renvoie à la prochaine section. C’est sa façon de résoudre l’équation dont nous avons posé le principe.
Et c’est évidemment autour de ce noyau critique, penchant individualiste/penchant social – et des diverses résolutions possibles qu’on peut imaginer à son sujet, que se sont élaborées les multiples hypothèses critiques (variantes théoriques) qui ont été proposées par les différents penseurs ou écoles de pensée en économie. En fait, la plupart des analyses critiques qui nous sont proposées se situent quelque part le long de cet axe problématique « homo oeconomicus/homo socialis », chaque groupe d’hypothèses théoriques nous présentant un certain nombre de propositions susceptibles d’améliorer l’efficience du système de l’économie politique en vigueur dans un type de formation sociale donné.
Par exemple des penseurs comme Pierre Rosanvallon feront valoir que l’État Providence, dans nos sociétés démocratiques, est menacé du fait de solidarités mécaniques pré inscrites dans la forme de l’État Providence sans que soit réellement effectif et conséquent l’investissement socialisant de chacun des acteurs sociaux concernés par des tels mécanismes de transfert. Ici le penchant individualiste tend à exercer une pression régressive constante sur ces mécanismes de transfert pré inscrits dans cette forme institutionnelle automatique de solidarité qu’est l’État Providence.
Par exemple des penseurs comme Serge Christophe Kolm essaieront de faire valoir les bienfaits d’une architecture politico-économique construite sur trois grands principes de développement économique : le secteur de l’économie étatique et paraétatique ; le secteur de l’économie sociale, coopérative et associative ; le secteur de l’économie privée et concurrentielle. Ce qui correspond dans les faits à une synthèse dynamique originale de la dialectique « penchant individualiste/penchant social ».
Par exemple des penseurs comme John Maynard Keynes feront valoir les effets bénéfiques, aussi bien au niveau humain qu’au niveau économique, qu’il y a à assurer à chacun des acteurs sociaux un minimum de ressources financières … ce qui assure la paix sociale, relance la consommation et par ricochet la production. On sait la popularité qu’a eu le modèle socio-économique du « New Deal » pendant près d’un demi siècle, et cette popularité a largement résidé sur le fait qu’une telle conception du développement économique constituait d’emblée une synthèse dynamique se situant au centre du spectre que nous avons défini plus haut : axe « penchant individualiste/penchant social ».
On pourrait multiplier à l’infini les exemples de penseurs (politologues, économistes, etc.) dont les propositions théoriques de développement composent un modèle économique qui assure d’emblée une synthèse dynamique de l’équation (penchant individualiste/penchant social) dont nous avons posé plusieurs fois le principe dans cet article.
Principes de développement :
L’objectif, dans un deuxième temps, sera d’élaborer un modèle fondé sur l’idée d’une synthèse dynamique des impératifs propres au modèle de l’homo oeconomicus et au modèle de l’homme nouveau ; cette synthèse dynamique devra par conséquent s’organiser autour des principes théoriques de développement suivants :
Construire le système des paramètres politiques et économiques de base devant favoriser l’utilisation massive chez l’individu de ses potentialités économiques naturelles les plus nobles (initiative, innovation, esprit d’entreprise, travail, risque, accroissement de la productivité, etc.)
Fonder le système des « incitatifs » (profits matériels, profits monétaires, profits symboliques, avantages, droits, etc.) devant « inspirer » et « guider » les tendances individuelles à créer de la richesse
Construire le système de contraintes qui « réprime » chez l’individu les « tendances » et « penchants » qui s’avèrent destructeurs pour la production saine de richesses
Construire le système des fonctions sociales primaires devant être incorporées dans les équations de développement économique
- c) La nouvelle économie politique
Marx, dans son questionnement sur les fondements de l’économie politique, a ouvert un type d’interrogation que la plupart des auteurs, parce qu’ils ne cherchent plus à réfléchir globalement cette science singulière qu’était l’économie politique et sont conditionnés à penser dans le cadre des disciplines académiques compartimentées (économie, science politique, sociologie, etc.), ne considèrent même plus comme une problématique pertinente à investiguer. Marx voulait rendre compte du type d’État politique existant en fonction d’une formation économique donnée : le capitalisme.
Évidemment, la forme globale des institutions politiques existantes dans la société capitaliste demeurait pour le père du socialisme déterminée par la forme générale du système économique désigné et par le mode de production dominant qui existait ; mais Marx a tout de même cherché à construire une science de l’économie politique qui ne soit pas seulement une science politique d’un coté et une science économique de l’autre.
Peut-être faudrait-il reprendre l’enquête ouverte par Marx dans le but d’élaborer une nouvelle science de l’économie politique – dégagée de la coloration idéologique que Marx lui a léguée et qui la discrédite aux yeux des penseurs contemporains. L’objectif de la nouvelle économie politique sera de réfléchir consubstantiellement un type donné de système économique avec un type donné d’institutions politiques : les deux doivent s’induire mutuellement afin de baliser et d’encadrer d’une manière efficiente le déploiement généralisé d’une économie politique globale au sein d’une société donnée.
Car une des plus grandes prises de conscience qu’a dû réaliser la science économique au vingtième siècle – même si elle continue à nier ce fait – c’est que le développement économique se réalise toujours beaucoup mieux dans une société où les dispositifs politiques sont pertinents et performants que dans des sociétés où ces dispositifs sont soit absents soit non pertinents. Et de dire ceci, impliquait déjà que la nouvelle science de l’économie politique ait reconnu d’entrée de jeu l’importance de la place et du rôle que doit jouer, dans toute société, l’architectonique institutionnelle déployée. Au lieu de considérer les artefacts institutionnels comme des excroissances regrettables et de croire que tout irait mieux dans le meilleur des mondes si ces créatures dangereuses n’existaient pas, la nouvelle économie politique reconnaît l’importance de ces monstres froids et impersonnels tout en s’assurant par ailleurs que les dispositifs institutionnels qui seront édifiés soient les meilleurs et les plus performants que l’on puisse imaginer en fonction du type d’économique que l’on désire faire émerger. La nouvelle économie politique cherchera donc à mieux comprendre ces relations fondamentales entre dispositifs politiques pertinentes/performants et développement économique dynamique et viable.
Le laisser-faire absolu ne mène qu’au chaos et à l’anarchie et seuls les idéologues les plus obtus croient encore à la réalisation d’une société un tant soit peu viable par le biais d’un laisser-faire radical. Maintenant la question demeure de savoir quel type de dispositif institutionnel doit être considéré, en fonction de chaque réalité socio économique particulière, comme le plus pertinent et le plus performant. De plus, et pour chaque secteur d’activité considéré, on peut se demander quel type de dispositif institutionnel spécifique pourrait s’avérer le plus approprié. Pour un secteur d’activité que l’on désire maintenir dans un état de concurrence et de compétition quasi pur, le mécanisme institué du marché (régulation par la main invisible d’Adam Smith) peut s’avérer être le meilleur dispositif envisageable. Pour un secteur d’activité que l’on désire soustraire entièrement à la logique du marché, un dispositif institutionnel beaucoup plus contraignant et hermétique pourra s’avérer plus pertinent/performant. Pour un secteur d’activité que l’on désire dynamiser le plus possible, un dispositif institutionnel hautement incitatif sur l’action pourra s’avérer le plus pertinent/performant. Pour un secteur d’activité que l’on croit susceptible de mieux se développer dans un futur proche si ce secteur jouit de mécanismes hautement régulateurs et protecteurs, un dispositif institutionnel davantage protectionniste pourra s’avérer le plus pertinent/performant.
Il faut donc cesser d’opposer idéologiquement le politique et l’économique et tenter plutôt de saisir quel type d’architecture institutionnelle donné s’harmoniserait le mieux avec tel autre type donné de formation, de processus et de structure économiques. Aussi le type de questionnement qui devrait aujourd’hui nous interpeller pourrait se formuler ainsi : pour réaliser avec le maximum d’efficacité une forme économique spécifique, quel type de dispositif légal, réglementaire et institutionnel serait-il le plus approprié et le plus productif d’édifier ? Comment réfléchir la performance et la pertinence d’un dispositif politique ou institutionnel en fonction d’un type donné de processus ou de structures économiques?
Principes de développement :
L’objectif, dans un troisième temps, sera de développer un modèle qui cherche à réfléchir la forme et le type de dispositif institutionnel qui convienne le mieux (le plus pertinent/performant) à une forme ou un type correspondant de développement économique
Déterminer, en fonction de la contingence et de la nécessité propres aux choses humaines, le niveau de priorité et l’amplitude d’un dispositif institutionnel (forte priorité et forte amplitude des dispositifs fondamentaux de sécurité comme l’armée)
Déterminer, en fonction de la contingence et de la nécessité propres aux choses humaines, la nature et la forme d’un dispositif institutionnel considéré comme pertinent (dispositif institutionnel de santé ou d’éducation)
Déterminer, en fonction de la contingence et de la nécessité propre aux choses humaines, le type de dispositif institutionnel susceptible d’être le plus pertinent/performant dans une réalité donnée
Déterminer, en fonction de la nature de chaque secteur d’activité spécifique, le type et la forme précise du dispositif institutionnel susceptible d’être le plus pertinent/performant